01 février 2022

France 2030, former et traduire pour relever le défi d’une nation créative

« Placer la France à nouveau en tête de la production des contenus culturels et créatifs ». Huitième objectif prioritaire présenté par le Président de la République pour inscrire la France de 2030 dans un destin dont la portée devra être internationale. Pour tenir ce rang mondial en termes de contenus, il importe en conséquence, que lesdits contenus possèdent un puissant capital d’exportation, c’est-à-dire des qualités propres pour être désirés dans d’autres aires culturelles que la nôtre. Si ce préalable s’énonce simplement, sa mise en œuvre, plus complexe, implique que nous envisagions avant tout de réinvestir notre « appareil de formation », la manière la plus opérante pour un pays d’accompagner ses transformations. Car produire de nouveaux contenus culturels et créatifs de manière massive – tant sur le plan quantitatif que qualitatif – implique que l’on forme en grand nombre des individus de tous les horizons sociaux et culturels afin de développer notre potentiel de talents envisagés dans la plus large diversité possible. 

 
Une nation créative est une nation dans laquelle on place la créativité comme un fondamental au cœur des apprentissages dès le plus jeune âge. De fait, on multiplie les chances d’éveiller les vocations des futurs professionnels de la création. C’est ce qu’a réussi la Corée du Sud en moins d’une dizaine d’années. C’est ce qui a permis aux pays scandinaves de s’imposer avec des polars qui sont aujourd’hui des modèles du genre. C’est aussi la voie que nous empruntons avec l’emblématique série Lupin produite par Netflix, ou les formidables créatifs de l’animation issus des Gobelins, tous porteurs d’une authentique French Touch exportable. Aussi, pour faire évoluer notre appareil de formation, il faut se reposer sur le diptyque incontournable pour installer une nouvelle génération élargie de créatifs culturels : former et traduire. 
 
Former, c’est d’abord s’appuyer sur une éducation artistique et culturelle pour tous qui accompagne le développement de l’esprit créatif de tous nos élèves tout au long de leur parcours scolaire. Le « 100% éducation artistique et culturelle » suppose que l’on intègre l’idée que les talents imaginatifs peuvent se révéler partout – et c’est là notre richesse majeure – pour changer le paradigme de la formation. C’est parce que l’on apprend à lire et à écrire à tous les enfants que nous nous donnons une chance de voir surgir des auteurs de n’importe quel milieu social ou culturel. Former, c’est aussi installer des filières d’écriture, non pas dans des écoles spécialisées, mais bien au cœur de tous les établissements d’enseignement supérieur, en formations initiales et continues, en filières générales, technologiques et professionnelles parce que les FASP – les Fictions À Substrat Professionnel – constituent un réservoir inépuisable d’histoires inscrites dans nos réalités. Les plus belles fabriques créatives prennent toujours appui sur un quotidien que l’on sait sublimer par l’entremise de notre imagination. Former, c’est enfin apprendre à traduire. Traduire nos imaginaires en fiction. Traduire nos fictions pour qu’elles soient signifiantes au-delà de nos frontières culturelles propres. « Il faut parler (aimer suffit) au moins deux langues  écrit Barbara Cassin – pour savoir qu’on en parle une, que c’est une langue que l’on parle ». Cet apprentissage est ludique, par nécessité, indispensable pour rendre intéressants pour le plus grand nombre nos fictions, nos jeux vidéo, nos œuvres et nos productions culturelles cinématographiques et audiovisuelles. Ce n’est pas pour rien que Pasolini pensait que « La traduction, sous tous ses aspects, est l’opération la plus vitale pour l’homme », c’est aussi le cœur de toute œuvre qui aspire à diffuser sa part d’universalisme.