25 juin 2011

GOÛT DE L'ENQUÊTE ET LUTTE DE CLASSES

"Quand je dirai ça à ma femme"...

Ce vendredi 24 juin, Peter Falk est mort. Il avait 83 ans. Comédien fétiche de Cassavetes, il a su accompagné ce cinéma américain-là qu’on dit indépendant. Il était en ce sens un merveilleux passeur car il avait su aussi ramener John le ténébreux dans « sa » série TV : Columbo. L’inspecteur Columbo a été et demeure l’un des personnages les plus populaires de la télévision. Chaque fois qu’il débarque sur une scène de crime, on croirait qu’il s’est gargarisé avant du slogan des récentes pub McDo : «venez comme vous êtes !»… Columbo vient comme il est avec son style mal fagoté de petit immigré italien qui laisse souvent penser à ceux qui le regardent avec mépris que son poste d’inspecteur est sûrement la promotion la plus importante qu’il n’aura jamais. Au reste, nombre de ses adversaires tenteront souvent de le déclasser en faisant appel à ses supérieurs. Columbo est un homme modeste qui exacerbe le dédain de classe de ceux qui toujours commettent des crimes de confort, de milieu, histoire de faciliter une vie – la leur – qui visiblement l’était déjà amplement.

Columbo, c’est l’entrée du populaire chez le notable. Et, les scénarii les plus aboutis de la série ont parfaitement su se saisir de l’idée de lutte de classes que la dégaine de l’inspecteur est susceptible d’inspirer. La condescendance des riches et des puissants y devient leur principale faiblesse. Columbo offrira aux spectateurs les plus populaires, «ceux de la classe dominée» une revanche télévisuelle, symbolique, une contrepartie culturelle à leur quotidien. Sans cynisme, avec une sorte de respect de la nature humaine. Car la plus belle revanche des classes populaires version Columbo, c’est bien de nous montrer qu’une enquête, elle, ne s’exerce jamais avec condescendance ni mépris, mais surtout avec passion et respect vis à vis de ceux qui pensent toujours, tout le temps, si bien nous manipuler. Une leçon de vie.